« En armure dans les marécages. En armure dans les marécages ! Autant me jeter du haut du pic des sacrifiés, à l'intérieur du volcan kikrash ou aller taquiner un groupe de dragons, ma mort sera plus rapide ! Enfin ça dépend des dragons. »
Elle continue de rouspéter contre sa bêtise tandis qu'elle barbote dans l'eau en se déplaçant assez difficilement. Entre l'eau qui réduit ses mouvements et son armure qui semble décidé à peser plus lourd que d'accoutumé, elle a l'impression d'avancer aussi vite qu'un poisson dans la neige. Parlant de neige, il faudrait que quelqu'un vienne lui expliquer comment elle a pu dévier à ce point de sa route initiale alors qu'on lui a simplement dit que les marécages était un lieu parfait pour perdre quelque chose et ne jamais le retrouver. Franchement, qui donc serait à ce point intéressé par ce lieu juste parce qu'on lui dit qu'y perdre quelque chose est facile et que le récupérer l'est nettement moins, si ce n'est pas impossible, qui ? Enfin qui hormis elle ? Personne. Parce que les gens ont assez de jugeote pour éviter d'aller se perdre dans un tel lieu.
Plus les années passent et plus elle est ravie de ne pas avoir d'écuyer à s'occuper. En fait, elle est passée par plusieurs phases à ce sujet. Le premier mois elle l'a passé à être perdu de quitter le rang d'écuyer et contente de ne pas en avoir, par contre, quelques mois plus tard elle a traversé une période d'abattement. Si on ne lui a pas confié d'écuyer alors est-ce que ça veut dire qu'elle a été jugée incapable d'en entraîner un et de le guider sur la voie de la chevalerie ? L'idée d'être jugée incapable n'était pas très agréable à porter, mais après une agréable conversation avec Samaël elle a cessé de s'inquiéter à ce sujet et recommencé à apprécier de ne pas en avoir et de pouvoir circuler librement dans l'empire. Enfin librement, oui, mais en fonction des missions données et des informations grappillées sur la tour des mages. A présent, elle est juste contente de ne pas avoir entraîné d'écuyer dans ses galères et ses coups de têtes, le pauvre qui serait à barboter dans un marais au milieu des crapaud, des algues et peut-être même des sangsues.
Il faut admettre qu'elle ne serait peut-être pas venue dans ce coin accompagné d'un écuyer, pas pour une histoire de protection, de manque de confiance ou de compétence, mais plutôt parce que cette virée n'a de valeur que pour elle et ses pouvoirs. Maintenant qu'elle se sait capable d'augmenter la distance de son pouvoir de dématérialisation et de matérialisation et qu'elle maîtrise complètement le lieu d'apparition de l'objet, l'idée lui est venu de disperser quelques armes juste au cas ou. Bien sûr, le principe est de placer l'arme dans un coin où personne ne va ou alors rendre inaccessible la planque de l'arbre. Sauf qu'il y a comme une faille dans le plan, pour savoir si un coin est accessible ou non il faut s'y rendre et tester, ce qui signifie aller patauger dans un marais pour en connaître la profondeur approximative, les obstacles et tout ce qui est important de savoir. Ok, pas de soucis avec le fait de patauger dans une eau à la propreté plus que douteuse, mais la prochaine fois elle se délestera de son armure ou trouvera un sort pour la rendre plus légère. Heureusement qu'elle ne va pas avoir besoin de se battre, la zone est calme et, malgré les ondulations autour d'elle dû aux poissons, rien ne s'agite.
Un pas, le pied qui s'enfonce dans une espèce de vase qui lui tire un soupire démoralisée, un second pas tranquille, un autre et puis encore un, Ylvä est proche de jubiler d'avoir réussi à faire autant de pas sans problème jusqu'à ce qu'une ombre se montre au sol suivi de quelque mouvements d'air. Soit c'est un très, très gros héron, soit c'est un dragon. Dans un cas comme dans l'autre, ce n'est pas intéressant, enfin si, mais plutôt, mais c'est qu'elle veut sortir de ce marais assez vite alors pas le temps d'admirer le paysage. Sauf que voilà, le dragon se pose à côté d'elle avec l'élégance et la maîtrise d'un éléphant ivre d'ailleurs.
"Eh toi ! Y a un p*tain d'anaconda géant qui t'entoures !"
Comment ça un anaconda géant ? Du courrier ? Hein que quoi ? Face à la main tendue, Ylvä tend la sienne pour attraper la lettre tout en regardant l'apprentie d'un air ahurie. Elle ne s'arrête jamais ? Elle pourrait presque être pire qu'elle à parler sans laisser le temps à l'autre de réagir. Enfin presque seulement. Disons que l'apprentie est plutôt dans le genre "coucou, tiens une bombe, aller tchao" et c'est encore plus perturbant, le dragon semble assez d'accord pour trouver ça bizarre d'ailleurs. Enfin peut-être, tout ce qu'elle voit c'est l'énorme tête qui fixe un corps plus petit qu'elle, mais bon.
« Attend un peu. Tu me dis qu'il y a un gros serpent qui m'entoure et tu pars ? Juste comme ça ? Je ne pensais pas que les seccyeth accueillaient des froussards dans leurs rangs, mais c'est vrai que ça doit trop effrayant de se battre qu'on une créature du genre, je comprend. »
L'air de rien elle hausse les épaules et se détourne d'elle pour tenter d'apercevoir l'envergure du serpent ainsi que sa tête. L'affronter seule ne l'inquiète pas, mais à plusieurs c'est plus amusant et encore plus quand quelqu'un peu prendre de la hauteur, alors autant inviter la seccyeth à se battre, non ? Oui, enfin l'invitation est camouflée quelque part derrière la pique lancée, parce qu'étant donné le personnage elle a comme l'impression que lui demander en souriant de se joindre à elle pour s'amuser contre un gros serpent ne l'aurait pas motivé.
« « Ah, merci pour la lettre au fait. Amuses-toi bien à livrer les autres ! » »
Peut-être un peu trop piquant et provoquant ? Non, pas tant que ça, même pas du tout en fait. Bon, mission trouver la tête. Elle pourrait tenter de jouer sur son pouvoir de l'eau pour la secouer un peu et tenter de voir la bête, mais vu la propreté ce n'est pas sûr que ça soit si efficace. Bon, une chose est sûre, son amure est relativement inutile et même plutôt encombrante. Si la bête décide de la manger ce n'est pas une amure qui va l'en empêcher. Dégainant ses deux lames, elle use de son pouvoir pour dématérialiser le plastron et le matérialiser plus loin sur la berge. Dans la boue, certes, mais sur la berge hors de l'eau.