[EXAMEN] - Time to build my Empire - [TERMINE]

Sans lâcher son adversaire des yeux, Ismaëlle arracha sans ménagement la manche droite de sa chemise, celle en moins mauvais état, le tout à l'aide de ses dents pour ne pas lâcher sa prise sur son arme. Elle n'avait jamais autant ressemblé à une créature sauvage qu'en cet instant, couverte de poussière, de sable, le tout étant collé à sa peau par la sueur. Au moins les spectateurs ne devaient ils avoir aucun mal à différencier le Mym'etys de la recrue.
Du lambeau de tissu elle fit une boule qu'elle pressa contre sa taille à l'endroit de sa plaie. Elle parvint a maintenir le tout en place au moyen de la ceinture de sa tunique. C'est d'une main tremblante qu'elle serra son pansement improvisé sans le moindre ménagement. Elle était déjà percluse de douleurs de la tête aux pieds, qu'était un élancement supplémentaire ? Le plus important restait d'endiguer le saignement, ce que devait permettre le tampon et le garrot sommairement et hâtivement bricolé, au moins pour un temps. Tourner de l’œil et s'effondrer dans l'arène signifiant la fin du combat, Ismaëlle était bien décidée à puiser dans ses ultimes ressources. Elle ne s'était pas entraînée si durement pour échouer à cet examen, fut elle une simple Espoir.

Elle n'eut cependant pas le temps d'améliorer davantage son état, car déjà son double revenait à l'attaque. En effectuant des passes d'armes avec la chose, Ismaëlle affichait un rictus torve qui cachait fort mal sa grimace de dépit. En d'autres circonstances, elle était certaine qu'elle aurait pu venir à bout de son adversaire. Mais son corps lui était un véritable handicap, limitant ses mouvements, sa rapidité, sa force... tout cela était enrageant pour la jeune fille. Plus grande encore fut sa colère alors que lui parvenait le tumulte des gradins : il ne pleuvait plus d'insultes, mais un rire plein de condescendance qui meurtrissait bien davantage l’ego de la recrue.
Et bien si personne ne la pensait capable de vaincre, elle même croirait dur comme fer à sa réussite.

Elle sauta de côté pour éviter la lame ennemie, tout en essayent de taillader la face de son adversaire en tenant son arme le plus loin possible pour maximiser son allonge et garder le Mym'ethys à distance. La créature tablait davantage sur une main ferme sur son arme, aussi lorsqu'elle tenta vivement une percée dans la défense de la recrue, elle parvint à lui arracher sa lame double, l'envoyant à une courte distance de là. Désarmée pour la seconde fois de la journée, Ismaëlle n'eut pas la force de masquer le cri aigu qui lui échappa en même temps que son arme. Ses mains étaient en feu, plus douloureuses qu'elles ne l'avaient jamais été...

Pour fuir son adversaire, Ismaëlle n'eut d'autre choix que de faire à nouveau des pas de côtés. Mais le Mym'etys, s'étant créé une ouverture tout à fait plaisante dans la garde de la recrue, continuait de harceler cette dernière. Bien évidemment, c'est en direction de son arme que l'Espoir recula. Quand la lame double fut à ses pieds, elle voulu se baisser rapidement pour s'en saisir, mais son adversaire frappa le sol de son arme pour empêcher que la recrue ne se saisisse de la sienne. Évitant de peu de se faire couper la main par un mouvement brusque vers l’arrière, elle se retrouva projetée au sol, emportée par son propre élan trop brusque. Si un rire discret franchit les lèvres du Mym'etys, il ne fut audible que d'Ismaëlle. Ce mépris supplémentaire pourtant l'atteignit en plein cœur.
Tenant sa lame double à la verticale, comme un piquet ou une lance, la créature se mit à l'abattre au sol, visant les jambes de la recrue pour les embrocher.

Comme le cœur d'Ismaëlle tambourinait à folle allure dans sa cage thoracique, elle eut un réflexe qui eut pu être malheureux en d'autres circonstances, mais qui eut au moins le mérite de surprendre le monstre : au moment où la lame se plantait dans le sable là où se trouvait la jambe d''Ismaëlle une fraction de seconde plus tôt, la recrue donna un franc coup de pied dans le manche de l'arme, alors même qu'elle était toujours à terre. Le choc tira une grimace à la jeune fille, mais également à son double, qui vit sa prise sur le manche de son arme faillir et lui échapper un court instant. Et ce court instant fut celui qui permit à Ismaëlle de s'emparer de sa propre arme. Alors, sans prendre réellement le temps de viser, ayant simplement en tête l'envie de blesser son adversaire pour s'en éloigner, elle donna un coup de taille droit sur les mollets du Mym'ethys. Le coup ricocha sur les jambières que portaient la créature. Avec un cri de rage, Ismaëlle roula au sol, tenant sa lame à l'horizontale, tout contre elle, de sorte finir sa roulade face au dos de la créature. Et là, alors qu'elle se relevait vivement et maladroitement, elle suivit son instinct, et donna un nouveau coup en direction des chevilles de la créature, là où se trouvait l'articulation de ses solerets. Le coup de lame en balayage vint mordre dans le talon d’Achille droit du Mym'etys qui s'éloigna vivement en claudiquant avec un chuintement. Temps que mit à profit Ismaëlle pour se remettre pleinement sur ses pieds. Elle tremblait de tout son être, et lorsqu'elle cracha à terre, ce fut pour découvrir sa salive teintée de sang. Son esprit sembla alors se déconnecter, et elle se fit à courir, rattrapant – presque - sans mal son adversaire. Sa vitesse fut mise à profit pour déraper dans le sable et se retrouver à nouveau à contourner son adversaire. Elle utilisa alors sa lame double pour venir faucher l'autre talon d'Achille, là où se trouvait la même faiblesse dans l'armure.  

Toute sa personne lui criait qu'elle avait atteint le bout de ses forces. Ses yeux étaient d'ailleurs embués, et elle mordait rudement l'intérieure de ses joues pour garder son esprit clair. Mais plus rien n'avait d'importance que sa victoire. Elle jouait sa fierté certes, mais elle était surtout entrée dans un état second où plus rien ne lui importait, au delà de ses propres limites...
Le Mym'etys fit volte face, s'attendant sans doute à une poursuite de combat prudente de la part d'Ismaëlle. Pourtant, la jeune fille se jeta pleinement sur son adversaire, ayant déviée sa lame double d'une parade maladroite de son avant bras. Il en résultait une nouvelle blessure, mais l'Espoir n'était plus à cela près.

Elle était à présent toute proche du Mym'etys, proche à en voir leurs souffles se mêler. Quelle meilleure réaction alors que donner un violent coup de tête à la créature ? À son propre reflet ? L'effet en était perturbant, mais une fois encore, le mélange d’excitation et de fatigue anesthésiait le corps et la raison de l'Espoir.
La plus surprise par le geste n'en resta pas moins la créature, qui recula en se tenant le visage. En faisant cela cependant, à moitié en chancelant, prenant trop appui sur ses chevilles blessées, si bien qu'elle tomba genoux à terre. Ismaëlle s'en rapprocha lentement, autant par prudence que parce qu'elle était elle même ébranlée par le coup qu'elle venait de porter. Arrivée au chevet de la chose, elle posa le pied sur la lame double de son adversaire et s'y appuya de tout son poids pour que le Mym'etys ne la puisse pas récupérer. Pour sa part, elle éleva son arme au dessus de son adversaire sonné, avant de l'abattre. Elle voulait en finir pour de bon, et n'était plus à une mort près. Alors la consigne ultime de l'Examen lui revient en tête. Elle ne devait pas le tuer. Elle dévia son arme in extremis, dont le manche vint finalement heurter violemment la tempe du Mym'etys, aider en cela par l'élan prit.

Le coup porté résonna longuement dans le bras d'Ismaëlle alors qu'elle voyait sa copie tomber face contre terre, assommée pour de bon. Son arme lui échappa des mains, et elle la laissa glisser au sol sans chercher à la retenir. Elle songerait plus tard a récupérer ce présent que lui avait fait Thaïs.  Contemplant son œuvre, c'est son propre corps qu'elle vit étendu à terre. Elle s'en éloigna précipitamment, avant de sentir ses forces l'abandonner pour de bon. Elle atterrit sur son séant au milieu de l'arène, hébétée. Elle n'arrivait plus à déglutir, et avait la bouche sèche. Pourtant, un sentiment d'euphorie prit peu à peu le pas sur tout le reste. Elle se releva, péniblement certes, mais elle fut bientôt sur ses jambes, même chancelante. Là, elle leva les bras au ciel, bien vite pourtant ramenée à l'ordre par les élancements de son dos meurtri. Pourtant, le cri qui lui échappa fut un hurlement victorieux, et non un cri de douleur. Elle exultait, elle était épuisée, fourbue, en miette, mais elle exultait. Et jamais elle ne s'était sentie aussi fière de toute sa courte vie.